Meet Innov : En Inde, des millions de non-voyants traités grâce à des innovations radicales


Le docteur Para est responsable de l’institution Aravind Eye Care System qui a permis de traiter plusieurs millions de personnes malvoyantes ou nonvoyantes en Inde, en mettant en œuvre de nombreuses innovation d’organisation, de technologie et de modèle économique.

Panorama

Si 37 millions de personnes souffrent de cécité dans le monde, 13 millions se trouvent en Inde, dont 300 000 enfants. Cette proportion supérieure à la moyenne s’explique avant tout par des raisons sociales.

En effet 80% des cas de cécité peuvent être traités, certains très facilement (ex : chirurgie de la cataracte). Mais les citoyens les plus pauvres et/ou habitant dans des villages reculés n’accèdent pas aux soins, même lorsqu’ils disposent d’un diagnostic et d’une ordonnance, pour des questions de coût et de transport principalement.

Pourtant en Inde aujourd’hui une opération de la cataracte dure seulement 10 minutes (contre 20-30 minutes en Europe) et permettrait de rendre la vue à 5,7 millions de personnes en Inde. Quant aux paires de lunettes ophtalmologistes, elles permettraient de soigner 2,4 millions de personnes en plus.

L’organisation de l’Arvind Eye Care System pour l’accès aux soins

Créé en 1976 avec un seul établissement de 11 lits seulement, l’institut Arvind est maintenant composé d’un réseau de soins de la vision à niveaux multiples :

  • 5 centres de soins de niveau 3, véritables hôpitaux universitaires de la vision, peuvent traiter 1000 à 2000 patients par jour chacun et disposent des technologies et des spécialistes les plus pointus ;
  • 5 centres de soins de niveau 2 disposent de médecins spécialistes de la vision et prennent en charge plusieurs centaines de patients par jour chacun ;
  • 6 hôpitaux de jours permettent d’apporter des soins à 100 – 150 patients par jour chacun ;
  • Enfin 41 centres de soins primaires accueillent 15 – 25 patients par jour chacun.

Le dispositif est complété par des équipes mobiles réalisant des diagnostics dans les villages à travers le pays. Ces équipes médicales ne se contentent pas de réaliser des diagnostics : elles sont capables de mettre à disposition des lunettes sans qu’un déplacement ou un rendez-vous médical additionnel soit nécessaire (sinon 50% des patients ne feront pas le déplacement pour des raisons de coût et d’accès aux transports) et elles transportent les patients directement à un centre de soins de premier niveau. Cette démarche renforce considérablement l’accès aux soins.

En 2011 l’offre de soins d’Aravind Eye Care était accessible par environ 75% de la population et 91% des problèmes étaient traités localement dans un centre de soins primaires.

Un modèle économique inspiré de Robin des Bois

Le docteur Para décrit le modèle économique de son institution comme directement inspiré par Robin des Bois (« prendre aux riches pour donner aux pauvres »), à la différence que les riches sont consentants et obtiennent quelque chose en échange.

Plus concrètement, l’institution ne fait payer que 50% de ses clients, ceux disposant d’une mutuelle remboursant les soins, et subventionne les soins pour les 50% restant. Elle utilise en particulier les économies d’échelle pour mettre à disposition de tous son dispositif de soins.

Plus impressionnant encore, ce modèle est en vigueur depuis bientôt 30 ans, malgré une augmentation constante du nombre de patients. En 2011l’Arvind Eye Care a réalisé 2,4 millions de consultations, 350 000 opérations chirurgicales dont 50% n’ont pas été facturées aux bénéficiaires.

Pourtant l’institut Arvind Eye Care repose sur un modèle privé (mais engagé !) et il dégage des bénéfices substantiels qui sont réinvestis chaque année dans le développement du réseau de soins et l’innovation.

L’approche de l’institut est celle d’une entreprise qui a le souci de la satisfaction de ses clients et une approche marché. Ainsi l’institut développe son réseau et met en place de l’innovation lui permettant d’atteindre plus de patients (c’est notamment le but des équipes mobiles).

Cette performance économique ne se fait pas au détriment de la qualité des soins. En effet une étude médicale a montré que les soins médicaux et les opérations chirurgicales fournis par l’institut avaient un taux de complications plus de 2 fois inférieur à celui constaté au Royaume-Uni !

Innovation à tous les niveaux

Outre l’organisation et le modèle économique qui permettent l’accessibilité maximale des soins, l’institut se différencie à plusieurs niveaux :

  • Formation innovante :
    • Les infirmières sont recrutées chaque année dans les villages (300 par an) sur des critères de valeurs partagées plutôt que les compétences initiales. C’est le programme de développement et de développement personnel qui leur permet par la suite qui leur permet,
    • L’ensemble du management est formé à l’entrepreneuriat, la gestion et l’innovation pour augmenter la performance de l’organisation ;
  • L’organisation des soins. En matière chirurgicale par exemple il est possible de mener jusqu’à six opérations en parallèle dans la même salle pour diviser par trois le temps moyen d’intervention ;
  • Production : l’institut a réalisé des transferts technologiques avec de grands groupes occidentaux afin de produire lui-même, en toute légalité, des produits ophtalmologiques. Cette filiale, AUROLAB, produits des lentilles pour des opérations de la cataracte au prix de 5$ pièce au lieu de 200-300$ en occident. Les produits ont la même qualité mais sont plus simples et produits en plus grandes quantités ;
  • Recherche : les médecins de l’institut réalisent des travaux de recherche qui permettent de concevoir de nouveaux équipements ou traitements, performants et économiques, utilisés ensuite par Aravind Eye Care System
  • Conseil :
    • Les activités de conseil externe permettent de propager et échanger les bonnes pratiques, notamment en constituant un réseau international d’institutions traitant les pathologies ophtalmologiques.
    • Les activités de conseil interne permettent à des centres de soins primaires de faire réaliser à distance des diagnostics sophistiqués par des experts ophtalmologiques situés à des centaines de kilomètres dans des centres de soins de niveau 3.

Poster un commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Vous commentez à l'aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion / Changer )

Vous commentez à l'aide de votre compte Twitter. Déconnexion / Changer )

Vous commentez à l'aide de votre compte Facebook. Déconnexion / Changer )

Connexion à %s